Transformation SPFPL en holding patrimoniale

De nombreux professionnels libéraux ont recours à la SPFPL pour structurer la détention de leurs sociétés d’exercice. Si cette forme juridique remplit efficacement sa mission dans un cadre purement professionnel, elle montre rapidement ses limites dès lors que des objectifs patrimoniaux plus larges entrent en jeu : transmission, capitalisation, ou diversification.

Dans ce contexte, transformer une SPFPL en holding patrimoniale peut s’avérer particulièrement pertinent. Quels sont les avantages d’une telle opération ? Comment la mettre en œuvre concrètement, et dans quelles conditions fiscales ? C’est ce que nous allons explorer dans cet article.

De la SPFPL à la holding : pourquoi envisager une transformation ?

La SPFPL : une structure juridique au service des professions libérales

La Société de Participations Financières de Professions Libérales (SPFPL) est une structure spécifiquement conçue pour permettre aux professionnels libéraux réglementés — avocats, notaires, experts-comptables, médecins, etc. — de détenir les titres de leurs sociétés d’exercice, comme les SEL ou SELARL.

Encadrée par la loi n° 90-1258 du 31 décembre 1990 et ses textes d’application, la SPFPL ne peut exercer elle-même aucune activité libérale. Son objet est strictement limité à la détention de participations dans des sociétés d’exercice professionnel, à condition qu’elles relèvent de la même profession.

La création d’une SPFPL permet principalement d’organiser le contrôle d’un groupe de sociétés libérales. Elle offre aussi un effet de levier pour les associés, notamment lors d’opérations de croissance externe ou de financement, en mutualisant l’investissement dans les structures d’exercice.

Les limites de la SPFPL dans une stratégie patrimoniale

Si la SPFPL joue un rôle stratégique dans la structuration d’un groupe de sociétés libérales, elle montre vite ses limites dès lors que les objectifs dépassent le simple cadre professionnel.

D’abord, son objet social est strictement encadré : elle ne peut détenir que des participations dans des sociétés d’exercice de la même profession. Impossible, donc, d’y loger de l’immobilier locatif, des placements financiers ou des parts de sociétés commerciales. Ce cloisonnement rend la diversification patrimoniale difficile, voire inenvisageable.

Ensuite, la SPFPL n’offre pas de réelle souplesse fiscale. Elle ne permet pas, par exemple, de bénéficier du régime mère-fille sur les dividendes, ni de mettre en place des stratégies d’optimisation sur les plus-values, comme pourrait le permettre une holding classique.

Enfin, la question de la transmission reste délicate : si la SPFPL peut théoriquement être transmise, elle reste liée à la qualité de professionnel libéral, ce qui limite fortement les possibilités de transmission familiale ou de transmission à des tiers non inscrits à l’ordre.

Autrement dit, la SPFPL reste un outil utile pour détenir et piloter une activité libérale, mais insuffisant lorsqu’il s’agit de construire une stratégie patrimoniale globale, à long terme.

La holding patrimoniale : une solution adaptée

Contrairement à la SPFPL, la holding patrimoniale n’est soumise à aucune restriction liée à une profession réglementée. Elle peut détenir tous types d’actifs : titres de sociétés commerciales, parts de SCI, portefeuilles financiers, voire actifs immobiliers. Cette souplesse en fait un outil central de nombreuses stratégies patrimoniales.

Une holding patrimoniale permet notamment de centraliser la détention des actifs dans une structure unique, de mieux organiser les flux financiers (dividendes, cessions, revenus locatifs), et d’optimiser la fiscalité applicable grâce, entre autres, au régime mère-fille ou à l’intégration fiscale.

Elle s’avère également particulièrement pertinente pour préparer une transmission d’entreprise ou de patrimoine familial. En interposant une holding entre la structure opérationnelle et les héritiers, il devient possible d’anticiper la transmission, d’appliquer des dispositifs fiscaux avantageux comme le pacte Dutreil, ou encore de moduler les pouvoirs de gestion tout en transmettant la nue-propriété.

Vous souhaitez faire un point sur votre situation ?

6 + 8 =

Comment mettre en place la transformation de la SPFPL en holding patrimoniale ?

Peut-on transformer directement une SPFPL ?

Peut-on transformer une SPFPL en holding patrimoniale de manière directe, simplement en modifiant les statuts ou l’objet social ? La réponse est non.

En effet, la SPFPL est soumise à un cadre réglementaire très strict, fixé par les ordres professionnels et la législation encadrant les professions libérales. Elle a pour objet exclusif la détention de parts ou d’actions de sociétés d’exercice libéral. Modifier cet objet reviendrait à faire perdre à la société son statut dérogatoire, ce qui impliquerait des conséquences juridiques et fiscales importantes.

Il ne s’agit donc pas d’une transformation au sens juridique classique, mais plutôt d’une restructuration patrimoniale à opérer via des montages adaptés.

Les alternatives possibles

Plusieurs schémas permettent d’aboutir à une structure de type holding patrimoniale, tout en sortant du cadre de la SPFPL :

L’apport des titres à une holding classique

Il est possible pour l’associé de la SPFPL de constituer une nouvelle holding patrimoniale (le plus souvent une SAS ou une SARL à l’IS) et d’y apporter les titres de la SEL détenus initialement via la SPFPL. Cette opération peut bénéficier d’un report d’imposition sur les plus-values (article 150-0 B ter du CGI), à condition de respecter certaines conditions.

La cession des titres suivie de réinvestissement

Autre option : la cession des titres détenus par la SPFPL, suivie du réinvestissement des liquidités dans une holding patrimoniale. Cette opération génère une fiscalité immédiate sur la plus-value, mais peut s’inscrire dans une logique de réorientation globale du patrimoine.

La dissolution de la SPFPL

Dans certains cas, la solution la plus simple reste de dissoudre la SPFPL puis de réorganiser les actifs via une nouvelle structure, notamment si la société n’a plus d’utilité professionnelle directe ou si elle ne détient plus de participations.

Étapes clés pour réussir l’opération

schéma qui présente les étapes de transformation d'une SPFPL en Holding patrimoniale

La fiscalité de la holding patrimoniale

La holding patrimoniale, lorsqu’elle est correctement structurée, offre un cadre fiscal particulièrement avantageux pour la gestion, la capitalisation et la transmission du patrimoine. Toutefois, l’efficacité de ce levier dépend d’une maîtrise des régimes fiscaux applicables, et d’un strict respect des conditions légales. Voici les principaux mécanismes à connaître.

Régime fiscal applicable à la holding

Soumission à l’impôt sur les sociétés (IS)

La holding patrimoniale est en principe soumise à l’IS, au taux normal de 25 % (en 2025), avec un taux réduit de 15 % sur les 42 500 premiers euros de bénéfice sous conditions. Ce régime permet une capitalisation des résultats au sein de la société, sans imposition immédiate chez l’associé personne physique, ce qui en fait un outil pertinent de gestion à long terme.

Régime mère-fille

La holding peut bénéficier du régime fiscal mère-fille prévu à l’article 145 du CGI. Ce dispositif permet, sous certaines conditions, une exonération à hauteur de 95 % des dividendes reçus de ses filiales.

Conditions principales :

  • Détention d’au moins 5 % du capital de la filiale ;
  • Conservation des titres pendant au moins deux ans ;
  • Option express pour le régime mère-fille.

La quote-part de frais et charges de 5 % reste imposable, même en l’absence de charges réelles, ce qui représente une taxation effective limitée à environ 1,25 % (5 % × 25 % d’IS).

Régime d’intégration fiscale

Si la holding détient au moins 95 % des titres de ses filiales, elle peut opter pour le régime d’intégration fiscale (articles 223 A à 223 U du CGI). Ce mécanisme permet de consolider les résultats fiscaux de l’ensemble du groupe, neutraliser les dividendes intra-groupe, et compenser les déficits et bénéfices des entités intégrées.

L’intégration suppose :

  • Une détention directe ou indirecte à 95 % minimum ;
  • Une option exercée pour cinq exercices ;
  • L’unicité de l’exercice fiscal entre sociétés.

Ce régime est particulièrement utile pour structurer un groupe d’exploitation ou patrimonial cohérent sur le plan fiscal.

Pour contacter un conseiller en gestion privée

Fiscalité des apports et des cessions

Apport de titres à la holding : le report d’imposition

L’article 150-0 B ter du CGI permet, lors de l’apport de titres à une holding, le report d’imposition de la plus-value constatée. Ce mécanisme ne supprime pas la taxation, mais la différée.

Conditions du report :

  • Apport de titres à une société soumise à l’IS ;
  • Contrôle de la société bénéficiaire à l’issue de l’apport (détention directe ou indirecte de plus de 50 % des droits de vote ou du capital) ;
  • Remise exclusive de titres en échange (pas de soulte).

Le report prend fin si :

  • Les titres apportés sont cédés par la holding dans un délai de 3 ans sans remploi d’au moins 60 % du produit de cession dans une activité économique éligible (activité opérationnelle, hors gestion de portefeuille) ;
  • L’apporteur cède les titres reçus de la holding (avec déclenchement d’une imposition personnelle à l’IR).

Cessions de titres

La plus-value réalisée lors de la cession de titres par la holding est imposée au taux de droit commun à l’IS. Si les titres cédés sont des participations (> 5 %), détenues depuis plus de deux ans, la plus-value bénéficie d’une exonération quasi-totale à l’IS (article 219, I-a quinquies du CGI), seule une quote-part de 12 % reste imposable.

Cela permet, dans certains cas, une quasi-franchise fiscale sur les plus-values de cession de filiales.

Fiscalité des dividendes et remontée de flux

Régime mère-fille sur les dividendes

Comme évoqué plus haut, la remontée de dividendes depuis une filiale vers la holding est, sous le régime mère-fille, exonérée à 95 %, ce qui favorise la consolidation de trésorerie dans la holding. Cette trésorerie peut ensuite être réinvestie, distribuée ou utilisée pour racheter d’autres participations.

Arbitrage entre distribution et capitalisation

La fiscalité encourage une capitalisation des flux au sein de la holding plutôt qu’une distribution immédiate aux associés personnes physiques. En cas de distribution, les dividendes sont imposés selon le régime du prélèvement forfaitaire unique (PFU) de 30 %, sauf option pour le barème progressif avec abattement de 40 %.

L’arbitrage entre réinvestissement, distribution ou épargne patrimoniale (immobilier, contrats de capitalisation, etc.) doit être piloté en fonction de la stratégie personnelle des associés, de leur fiscalité marginale et des besoins de liquidité.

Optimisation et vigilance fiscale

Transmission et pacte Dutreil

En vue d’une transmission à titre gratuit (donation ou succession), les titres de la holding peuvent bénéficier du pacte Dutreil (article 787 B du CGI), sous réserve de remplir les critères d’éligibilité : activité opérationnelle directe ou indirecte, engagement collectif de conservation, poursuite de l’activité, etc.

L’exonération peut porter sur 75 % de la valeur des titres transmis, ce qui représente un avantage considérable dans un cadre patrimonial familial.

Encadrement fiscal et risque d’abus de droit

L’administration fiscale est particulièrement vigilante sur les structures de holdings patrimoniales, en particulier lorsqu’elles bénéficient d’un report d’imposition ou d’un régime de faveur.

Tout montage doit pouvoir justifier d’une substance réelle et d’un objectif économique :

  • Cohérence entre les flux, les actifs détenus et les fonctions exercées ;
  • Répartition équilibrée des pouvoirs et responsabilités ;
4.3/5 - (120 votes)
Aurélien GUICHARD

Aurélien GUICHARD

FONDATEUR, DIRECTEUR ASSOCIÉ

Depuis plus de 20 ans, Aurélien Guichard a développé une expertise en gestion privée et gestion de fortune. Diplômé d’un Master in international Business, membre de la Chambre Nationale des Conseils en Gestion de Patrimoine (CNCGP), il anime le développement du groupe Agora finance Gestion Privée qu’il a fondé en 2007.

8 + 7 =

Les informations recueillies sur ce formulaire sont enregistrées dans un fichier informatisé par Agora Finance. Elles sont conservées pendant trois ans et sont destinées à adresser une réponse à votre demande via ce formulaire. Conformément à la loi « informatique et libertés », vous pouvez exercer votre droit d’accès aux données vous concernant et les faire rectifier en contactant dpo@agorafinance.fr

[social_warfare]