La SCI soumise à l’impôt sur les sociétés (IS) constitue une solution performante pour la détention et la transmission du patrimoine immobilier. Bien plus technique que la SCI à l’impôt sur le revenu (IR), elle permet une véritable stratégie d’optimisation fiscale, de capitalisation et de gestion transversale du patrimoine.
Concrètement, il s’agit d’une SCI de droit commun ayant opté de manière irrévocable pour le régime de l’IS, conformément à l’article 239 du Code général des impôts (CGI). Cette option transforme en profondeur la fiscalité applicable à la société comme à ses associés, sans modifier sa nature civile sur le plan juridique. La SCI devient opaque fiscalement et assimilée à une société commerciale sur le plan fiscal.
Ce changement de régime fiscal ouvre de nombreuses opportunités, notamment pour les projets d’investissement locatif et d’OBO, mais cela suppose également une maîtrise technique rigoureuse.
Les avantages de la SCI à l’IS
Déduction optimisée des charges
L’un des principaux leviers de performance de la SCI à l’impôt sur les sociétés réside dans sa capacité à déduire du résultat imposable une large gamme de charges. Cette déduction concerne notamment :
- Les intérêts d’emprunt, qu’il s’agisse de dettes bancaires ou d’avances consenties par les associés ;
- Les travaux d’entretien, d’amélioration et parfois même de reconstruction, sous réserve de leur inscription en charges et non en immobilisations (selon leur nature et leur incidence sur la consistance du bien) ;
- Les honoraires de gestion, incluant notamment les frais d’expertise, de syndic ou les prestations de conseil ;
- La rémunération du gérant, dès lors qu’elle est justifiée et correspond à un travail effectif – elle est alors soumise aux charges sociales, mais entièrement déductible fiscalement ;
- Et surtout, l’amortissement de l’actif immobilier, qui permet d’étaler comptablement le coût d’acquisition du bien sur sa durée d’usage. Ce mécanisme, propre à la fiscalité des sociétés, constitue une véritable arme d’optimisation : il permet de réduire mécaniquement le bénéfice fiscal, sans sortie de trésorerie réelle.
En pratique, ces éléments combinés peuvent neutraliser, voire excéder, le bénéfice comptable de la SCI, générant des déficits reportables. Le résultat fiscal imposable peut ainsi être ramené à zéro pendant de nombreuses années, optimisant à la fois la trésorerie et la rentabilité nette après impôt.
Capitalisation facilitée
Contrairement à une SCI à l’IR où les bénéfices sont fiscalisés entre les mains des associés (qu’ils soient distribués ou non), la SCI à l’IS permet une capitalisation en société. Tant que les bénéfices sont conservés et non versés en dividendes, ils sont imposés à l’IS :
- 15 % jusqu’à 42 500 € (sous conditions),
- puis 25 % au-delà.
Ces taux sont très souvent inférieurs à la tranche marginale d’imposition des associés soumis à l’IR, surtout pour les foyers fortement fiscalisés. Cela permet de reconstituer des fonds propres dans des conditions fiscales avantageuses, renforçant la capacité d’autofinancement de la société et facilitant l’acquisition de nouveaux actifs.
Ce mécanisme est particulièrement adapté à des stratégies de croissance du patrimoine immobilier, notamment lorsqu’il s’agit de construire un portefeuille diversifié et pérenne.
Transmission optimisée
La SCI à l’IS offre des atouts considérables dans une logique de transmission patrimoniale :
- Valorisation nette des parts : les dettes figurant au passif de la SCI sont prises en compte pour déterminer la valeur des parts sociales. Cette valorisation nette, souvent inférieure à la valeur brute des actifs immobiliers détenus, permet de réduire la base taxable en cas de donation ou de succession.
- Décotes applicables : dans certaines situations (notamment en présence d’indivision, de minorité de bloc ou d’illiquidité), des décotes fiscales peuvent être appliquées à la valeur des parts, renforçant l’efficacité du montage.
- Maîtrise de la fiscalité en cas de transmission : en cas de donation avec réserve d’usufruit, ou de démembrement des parts sociales, la SCI à l’IS permet d’isoler les droits de chaque partie tout en conservant une gestion centralisée du bien. Cela facilite les transmissions progressives et maîtrisées dans le temps.
En outre, même si la SCI à l’IS ne bénéficie pas des abattements pour durée de détention sur les plus-values immobilières, les transmissions à titre gratuit ne déclenchent pas d’imposition immédiate sur la plus-value latente, contrairement aux cessions.
Structuration avec une holding
La SCI à l’IS peut être intégrée dans une structure de groupe, en particulier au sein d’une holding patrimoniale soumise également à l’IS. Ce schéma ouvre la voie à des stratégies de capitalisation consolidée, où les flux de trésorerie peuvent être remontés à la holding sous forme de dividendes intersociétés (bénéficiant alors du régime mère-fille, sous conditions).
Ce type de montage présente plusieurs avantages :
- Optimisation de la trésorerie intragroupe, notamment pour financer d’autres projets d’investissement ou redistribuer les flux vers d’autres entités du groupe ;
- Effet de levier fiscal renforcé, grâce à une meilleure gestion des déficits, des charges et de l’endettement global ;
- Structuration de la gouvernance patrimoniale, permettant de distinguer clairement la détention, la gestion, et la transmission des actifs.
Cependant, cette approche nécessite une vigilance accrue sur les risques de requalification en société commerciale de fait ou d’abus de droit. La cohérence globale de la stratégie patrimoniale, la substance économique de la holding, ainsi que le respect des principes comptables sont des conditions incontournables pour sécuriser le montage.
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Fiscalité de la SCI à l’IS
Imposition des résultats
Taux de l’IS
Depuis 2022, la fiscalité des sociétés suit un barème progressif qui s’applique également à la SCI à l’IS. Les taux d’imposition sur les bénéfices sont les suivants :
- 15 % jusqu’à 42 500 € de bénéfice, sous réserve du respect de certaines conditions : la société doit réaliser un chiffre d’affaires inférieur à 10 millions d’euros, avoir un capital entièrement libéré, et celui-ci doit être détenu à 75 % au moins par des personnes physiques (ou par des sociétés elles-mêmes détenues à 75 % par des personnes physiques) ;
- 25 % au-delà de ce seuil.
Ce régime fiscal s’applique sur le résultat net fiscal, c’est-à-dire le bénéfice dégagé après déduction de toutes les charges éligibles, ce qui permet une maîtrise précise de l’assiette imposable.
Charges et amortissements déductibles
L’un des principaux avantages de la SCI à l’IS réside dans la déductibilité fiscale élargie des charges engagées dans le cadre de son activité. Sont notamment considérées comme fiscalement déductibles :
- Les intérêts d’emprunt, qu’ils soient contractés auprès d’un établissement bancaire ou auprès des associés ;
- Les travaux d’entretien, de réparation ou d’amélioration, dès lors qu’ils ne modifient pas la structure de l’immeuble de manière substantielle (les travaux de reconstruction ou d’agrandissement sont souvent immobilisés) ;
- Les frais de gestion, incluant les honoraires de syndic, de conseil ou encore les frais administratifs courants ;
- La rémunération du gérant, soumise aux cotisations sociales si le gérant est une personne physique, mais intégralement déductible du résultat fiscal ;
- Et surtout, l’amortissement comptable de l’immeuble, réparti sur 20 à 50 ans selon les composants (structure, toiture, ascenseurs, installations techniques, etc.).
Ce mécanisme permet d’étaler le coût d’acquisition de l’immeuble, générant une charge comptable sans impact sur la trésorerie, ce qui constitue un levier puissant d’optimisation fiscale. Dans de nombreux cas, le cumul de ces charges permet d’annuler le résultat fiscal, voire de créer un déficit durable.
Déficits reportables
En cas de résultat négatif, la SCI à l’IS bénéficie d’un mécanisme de report fiscal très favorable. Les déficits fiscaux peuvent être :
- Reportés en avant sans limitation de durée, dans la limite annuelle de 1 million d’euros + 50 % du bénéfice excédentaire au-delà de ce seuil ;
- Ou reportés en arrière (« carry back »), permettant d’imputer un déficit sur les bénéfices de l’exercice précédent, dans la limite d’1 million d’euros, et ainsi obtenir une créance d’impôt remboursable (article 220 quinquies du CGI).
Cette flexibilité permet d’optimiser la charge fiscale dans le temps, notamment lors de projets à forte intensité d’investissement au départ, avec une montée en puissance progressive des revenus locatifs.
Obligations comptables et déclaratives
Contrairement à la SCI à l’IR, la SCI soumise à l’IS est considérée comme une véritable société commerciale sur le plan comptable. Elle doit respecter les règles du Plan Comptable Général et tenir une comptabilité d’engagement.
Elle est notamment tenue de produire chaque année :
- Une liasse fiscale complète, via le formulaire 2065 et ses annexes ;
- Des comptes annuels déposés au greffe du tribunal de commerce, si deux des trois seuils suivants sont dépassés : chiffre d’affaires > 800 000 €, total de bilan > 4 millions €, effectif > 50 salariés.
Une attention particulière doit être portée :
- Aux conventions entre associés, considérées comme conventions réglementées et susceptibles d’être contestées si elles ne sont pas conclues à des conditions de marché ;
- Aux méthodes d’amortissement choisies, qui doivent être cohérentes avec la nature des actifs et respecter les durées d’usage admises, sous peine de requalification ou redressement fiscal.
En cas de montage artificiel ou de structuration abusive, la SCI peut tomber sous le coup des mesures anti-abus prévues à l’article 64 du Livre des Procédures Fiscales ou à l’article 205 A du CGI, notamment en matière de substance économique ou de but principalement fiscal.
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Plus-values immobilières en SCI à l’IS
Régime des plus-values professionnelles
À la différence de la SCI à l’impôt sur le revenu, qui bénéficie du régime des plus-values privées avec abattement pour durée de détention, la SCI à l’IS relève du régime des plus-values professionnelles.
Les conséquences fiscales sont majeures :
- Aucun abattement pour durée de détention ne s’applique, quel que soit le temps de conservation du bien ;
- La plus-value est calculée sur la base de la valeur nette comptable de l’actif, c’est-à-dire après déduction des amortissements déjà pratiqués.
Ce mécanisme peut générer une imposition très élevée lors de la revente d’un bien fortement amorti.
Exemple : un immeuble acquis pour 500 000 €, amorti à hauteur de 200 000 €, est revendu 600 000 €. La plus-value comptable est de 300 000 € (600 000 – 300 000), soumise à l’impôt sur les sociétés. Cette taxation annule partiellement l’avantage lié à l’amortissement, surtout à court terme.
Transmission à titre gratuit
Même en cas de transmission non onéreuse (donation ou succession), la SCI à l’IS reste soumise au régime des plus-values professionnelles : la plus-value latente n’est pas purgée, et l’acquéreur reprendra la valeur comptable nette de l’actif.
Cependant, cette rigueur est compensée partiellement par deux mécanismes :
- La valorisation des parts sociales s’effectue après déduction du passif de la société (emprunts, dettes fournisseurs…), ce qui réduit l’assiette des droits de donation ou de succession ;
Des décotes sur la valeur des parts peuvent être appliquées en fonction du niveau de contrôle ou de liquidité des titres, ce qui permet de limiter l’impact fiscal de la transmission.
Stratégies patrimoniales
Traitement à l’IFI
Les parts de SCI à l’IS sont en principe imposables à l’IFI, sauf si elles sont affectées à l’activité principale professionnelle du détenteur (cas rare). Les dettes de la SCI sont en principe déductibles, mais certains plafonds peuvent s’appliquer (décret de 2017, doctrine BOFiP).
Cession de parts sociales
La vente des parts de la SCI peut offrir une alternative fiscale intéressante à la vente de l’immeuble. Elle permet notamment d’appliquer une décote sur la valeur des parts (indivisibilité, endettement, etc.), réduisant ainsi la base imposable.
Intégration dans une holding
La SCI à l’IS peut s’inscrire dans un schéma de capitalisation ou de transmission au sein d’un groupe familial. Il convient toutefois d’éviter tout risque de requalification en société de fait ou montage abusif.
Risques et limites
Requalification ou abus de droit
En cas de montage artificiel (notamment dans le cadre d’un OBO mal structuré), l’administration fiscale peut requalifier la SCI en société de fait ou abusive, avec les conséquences fiscales afférentes.
Plus-values fortement fiscalisées
L’absence d’abattement pour durée de détention est un inconvénient majeur, notamment en cas de revente à long terme.
Complexité comptable
La tenue comptable, la gestion des amortissements, le suivi des déficits exigent un accompagnement expert. Cela représente un coût récurrent à anticiper.
Quand opter pour une SCI à l’IS ?
Le recours à une SCI à l’IS doit être réservé à certaines situations spécifiques :
- volonté de capitaliser les revenus sans distribution,
- absence de revente à moyen terme,
- recherche de levier fiscal via l’amortissement,
- structuration dans une holding patrimoniale,
- stratégie de transmission optimisée.
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